Si on vous questionne sur l’intérêt de cultiver sous serre, vous risquez de répondre : « pour protéger les cultures du froid, bien sûr ! ». Et c’est bien normal de penser cela car c’est correct.
Mais c’est plus inhabituel d’entendre les personnes répondre : « la serre protège en été de la chaleur ».
Alors, ne vous êtes-vous jamais demandé pourquoi l’on peut voir des kilomètres carrés de serres professionnelles dans le désert ? En Tunisie ou au Sud de l’Espagne, ne fait-il pas suffisamment chaud pour cultiver directement au soleil ? Et même en Europe, pourquoi donc installer des serres alors que le climat se réchauffe ? 🥵
Cet article va très vraisemblablement vous surprendre et vous apprendre beaucoup de choses passionnantes au sujet de la gestion climatique en serre.
Car oui vous allez voir, la serre est très utile, voire devient indispensable pour la gestion de la chaleur.
Culture sous serre au-delà du “bien/pas bien”
Les serres souffrent à tort d’un déficit d’image.
Elles constituent pourtant un moyen de contribuer à une production d’origine locale. Les débats récents au sujet de la labellisation bio et du recours à des serres chauffées ont eu tendance à cristalliser les avis autour d’arguments caricaturaux. Les producteurs bio cherchent à protéger leur marché et c’est normal. Surtout que la conjoncture est difficile pour le bio, touché de plein fouet par la crise (hausse des prix, retour des fermes bio en conventionnel faute de moyen, revente des stocks non écoulés en conventionnel, etc.). Cependant, tous les sujets sont mélangés dans le débat. Respect des “cycles naturels”, culture hors-sol ou pleine terre, chauffage des serres, produits importés ou locaux, etc..
En effet, il y a une petite nuance entre une culture locale sans pesticide et en pleine terre sous serre non chauffée et une culture hors-sol d’Espagne en plein hiver sous serre chauffée.
10 000 ha : c’est la superficie en France consacrée à la culture sous serre (dont 2/3 pour les cultures légumières), soit 6,4 millions de tonnes par an de légumes, c’est-à-dire presque la moitié de la production nationale !
Source : Légumes de France et agriculture.gouv.fr
Concrètement, il est tout à fait possible d’avoir une culture sous serre qui soit écologique, naturelle, respectueuse des cycles naturels des variétés. Et d’ailleurs, avec le réchauffement climatique, la serre est en train de devenir une nécessité. Et ce, que ce soit pour le maraîcher professionnel comme pour le jardinier. Les aléas climatiques (inondations, canicules, épisodes de grêle, vents forts) sont une préoccupation grandissante des agriculteurs. Aujourd’hui, la moitié de la production légumière française se réalise sous serre.
Mais alors, si nous avons des canicules, en quoi la serre ne vient pas en rajouter une couche ? Voici l’explication.
Effet de serre : vous en reprendrez bien encore un peu ?
Un peu de théorie pour commencer.
Parlons ici de modèles de serres qui présentent des caractéristiques bioclimatiques. On parle d’une construction close ou semi-ouverte translucide, de préférence en verre, soutenue par une structure métallique, destinée à la production agricole/maraîchère, ou horticole. Une serre bioclimatique permet la régulation et le bon maintien des paramètres qui influencent la croissance des cultures.
Cultiver sous serre et gérer le climat
La hauteur de la serre va permettre de “tamponner” la chaleur, par le volume d’air compris entre la faîtière et le sol. D’ailleurs, plus la serre est haute, et plus l’effet de serre, contrôlé favorablement, impliquera une meilleure inertie. C’est pour ça que les serre chapelle type “hollandaises” sont si hautes (parfois jusqu’à 12 mètres !). Elles préservent toutefois 90% de luminosité (verre horticole, faible épaisseur des profilés).
En période froide, la serre est un dispositif de chauffage naturel (l’effet de serre). En effet, 1m2 de verre chauffé par le soleil équivaut à un radiateur de 800 Watts1. D’ailleurs, les jardiniers qui cultivent sous serre le savent bien, car ils se retrouvent bien vite en t-shirt en hiver dès que le soleil tape sur les vitres. Les architectes de l’habitat favorisent d’ailleurs le vitrage plein sud dans les maisons passives. C’est donc la manière la plus écologique (et économique !) de valoriser l’énergie solaire pour le chauffage.
En période chaude, ce sont les dispositifs de contrôle climatique qui vont permettre une régulation précise de la température :
- Le plus commun est l’ouverture automatique, de deux types (lucarne avec vérin à gaz ou ouvrant articulé au faîtage avec crémaillères pour les serres professionnelles).
- Le second dispositif saisonnier est l’ombrage, de deux types (toile d’ombrage ou la peinture d’ombrage). Il permet de limiter l’effet de serre mais il laisse passer la lumière requise sans excès.
- Troisième dispositif : la ventilation mécanisée avec des extracteurs simples ou des brasseurs d’air horizontaux, pour renouveler l’air de la serre et évacuer l’air chaud au faîtage.
- Derniers dispositifs : les brumisateurs pour les petites serres et les panneaux évaporatifs dans les grandes serres professionnels (pad cooler).
Trop chaud/froid, pas pour moi quand on est une tomate 🍅
Enfin, très important : la variation thermique : les cultures, notamment les légumes fruits (tomates, etc.), n’apprécient guère les variations de température. Le froid la nuit et l’humidité le matin et une trop forte température en journée sont des limitations à un bon rendement. Par exemple, chez une tomate 🍅, sachez qu’au dessus de 30°C, la fructification est ralentie et elle est stoppée dès que l’on dépasse les 35°C. Ensuite, les tissus de la plante peuvent endommagés si la température dépasse 38 °C ou si elle passe en dessous des 10 °C. La différence idéale jour/nuit est de 6 à 10°C afin de maximiser la production de fruits. La température optimale du jour est de 25 °C et de 17 °C la nuit. Cultiver sous serre va justement permettre de maintenir ces écarts et ces niveaux de température.
Cultiver sous serre et gestion de la chaleur : en pratique.
Culture estivale sous serre Myfood
A l’échelle d’une culture sous serre à domicile, la mise en place de dispositifs bioclimatiques conduit à des résultats surprenants.
En pratique, nous avons expérimenté et implémenté chez Myfood la mise en place d’équipements que vous retrouverez avec la serre Family22, notamment :
- Doubles portes avant et arrière
- Ouvertures automatiques des lucarnes
- Extracteur mécanisé à faible consommation électrique
- Toile d’ombrage professionnelle
- Plaques d’ombrage pour les bassins de poissons
Sur le tableau de bord connecté Myfood, nous mesurons les températures au quotidien à l’intérieur de la serre avec les capteurs connectés de température. La prise de température extérieure provient de données des stations météos. Mais plus visuellement, voici une prise de température ‘traditionnelle’ au thermomètre. La mesure note 40°C à l’extérieur de la serre en plein soleil en pleine journée d’un mois août et 30°C à l’intérieur au niveau des cultures aquaponique.
Soit un écart de 10°C entre l’extérieur et l’intérieur !
Résultats :
Les pieds de tomates bénéficient des conditions pour pouvoir travailler et continuer la croissance de leurs fruits, ce qui n’aurait pas été possible en plein soleil. Et par ailleurs, ces mêmes tomates sous serres n’auront pas à souffrir des tempêtes, de la grêle et des averses.
Conclusion, même en plein été avec les chaleurs du mois d’août, la serre est extrêmement bénéfique aux cultures et aux rendements. CQFD.
Si cet article vous aidé à y avoir plus clair, alors n’hésitez pas à partager à vos proches.
- Université d’Angers, « Modélisation de l’aération naturelle et du microclimat des serres en verre de grande portée sous climat tempéré océanique », page 196 (flux de chaleur du rayonnement solaire en Anjou : 740-827 W/m2).